Aller/Retour

English

Aller-retour

by Michèle Martel

Matthieu Martin’s work confronts to the act of looking. At the limits of the visible, his sculptures, photographs, and videos aim for a material and physical economy : the face of a pedestal is imperceptibly inclined, adhesive tape delimits and isolates the angle of a room, the walls of this same room undulate in order to simultaneously hide and mark the presence of ordinary equipment (radiators, electric plugs), the artist sits in city streets, but on seats that do not exist… These propositions reaffirm the impossibility of both lyricism and grandiloquence. This stance, both aesthetic and ethical generates, to paraphrase Pistoletto, a parasitic art, all about emptiness and austerity.
This material reductionism provokes a dialogue between the history of art, and that of the city. The images that constitute Cover Up – or the photographic documentation of graffiti’s painted over and thus obscured by the authorities, draws upon, not only the history of the monochrome, but also the new topographies, or the Dust Pieces of Erwin Wurn. This back and forth between different spaces and their ideological significance, is one that is for example explored and allegorized in Povera Mobility. This stone mounted on wheels constitutes a form routed in the variety of street furniture and in the multitudes of signs that organize traffic, movement, and flux. In its paradoxically natural state, this work refers to the larger history of sculpture, as well as to its continual displacement – this in both a literal and metaphorical sense. It’s mobility flips on their head the classical criteria’s of the medium : A form around which one can move, a pedestal on which to present it, and a place to immortalize it. The contradictory and ironical proposition entangles the spectator’s body to the object: Public space and private space.

Francais

Aller-retour

par Michèle Martel

Les pièces de Matthieu Martin opposent, au premier abord, une résistance au regard. À la limite du visible, ses sculptures, photographies et vidéos dénotent une volonté d’économie plastique : le plan d’un socle s’incline imperceptiblement, une bande adhésive vient isoler l’angle de la salle d’exposition, la paroi d’un des murs de cette même salle ondule afin de masquer — de marquer — la présence des éléments d’équipement ordinaires (radiateurs, prises électriques…), l’artiste s’assoit dans les rues d’une ville sur des assis debout inexistants… Le caractère ténu de ces propositions réaffirme l’impossibilité du lyrisme, de l’emphase et de la grandiloquence. Cette position tant éthique qu’esthétique, génère, pour reprendre les termes de Pistoletto, un art du dénuement, obtus, parasite. La création ne peut être valide qu’au terme d’une série de réductions.
Ces réductions plastiques engagent un dialogue entre l’histoire de l’art et celle de la cité. Les images qui composent Cover up, relevés photographiques des recouvrements des graffitis par les autorités, convoquent tout à la fois l’histoire du monochrome, les nouveaux topographes ou les dust pieces d’Erwin Wurm. En outre, ces palimpsestes renvoient aux repeints de la salle d’exposition. Cet aller-retour entre les espaces et leurs enjeux idéologiques se trouve allégorisé avec Povera mobility. Cette pierre montée sur roulettes est une forme trouvée dans la variété du mobilier urbain et dans la multitude de signes qui organisent les flux. Elle se réfère, dans son aspect paradoxalement naturel, à l’histoire élargie du champ de la sculpture ainsi qu’à ses déplacements, ici au sens propre comme au figuré. Sa possible mobilité retourne comme un gant les critères classiques du médium : une forme dont on peut faire le tour, un socle pour la présenter et un lieu pour l’immobiliser. La proposition contradictoire et ironique noue le corps du spectateur à l’objet, l’espace public à l’espace privé.